Link Wray est un grand guitariste injustement méconnu, ce n’est un
secret pour aucun amateur de vrai Rock. L’apache au perfecto noir est ni
plus ni moins l’inventeur du son fuzz, qu’il obtiendra en coupant dans
les haut-parleurs de son ampli de guitare. Et oui, à l’époque les
pédales à effet appartenaient au domaine de la science-fiction, c’est
tout juste s’il y avait un peu de distorsion.
Bien sûr Link Wray n’est pas un grand technicien, ses morceaux
instrumentaux sont principalement composés d’accords plaqués, parfois
augmentés d’un petit solo façon surf. Cela ne l’empêchera pas
d’influencer plusieurs générations de guitaristes, de Jimi Hendrix à
Neil Young en passant par les Cramps. Il obtiendra un tube en avril
1958 avec « Rumble », que Tarantino utilisera bien plus tard pour la B.O
de Pulp Fiction. Fort du succès rencontré par ce morceau, sa maison de
disque le fait entrer en studio pour l’enregistrement d’un album. Mais
voilà, une fois la chose enregistrée, Cadence Records refuse de la
sortir. Car la musique proposée sur « White Lightning » est d’une
violence inouïe pour l’époque, il faut protéger la chaste jeunesse
américaine, et aussi éviter tout débordement. Ce qui n’empêchera pas
notre homme de faire une carrière honorable par la suite, lorgnant
parfois vers la country.
« White Lightning » est un album qui s’écoute fort, très fort ; le son
est ample et sans fioritures. C’est ce côté primitif qui permet à cet
album de ne pas souffrir de son âge avancé, il n’a pas pris une ride.
Même cette vieille scie de « Rebel Rouser » possède ici une fraicheur
qu’on ne lui connaissait pas. Link Wray dynamite tout sur son passage
avec des titres comme « Drag race » et « Walkin’ With Link », alors
certes il n’a pas la vélocité d’un Dick Dale, mais il a ce côté
dangereux qui rend sa musique indéniablement plus sexy que celle du
gentil surfeur. Link joue gras, même sur les titres les plus calmes, ce
qui n’est pas sans rappeler un certains Keith Richards - pas non plus
un virtuose le vieux pirate des Stones.
Le 5 Novembre 2005, le vieux rocker cassera sa pipe dans une
indifférence quasi-générale. Seuls quelques vieux briscards lui rendront
un hommage sincère. Et en 2006, Sundazed (superbe label spécialisé
dans la ré édition qui tue) publiera enfin les sessions de 1958 avec un
son sublime et quelques prises alternatives. Si vous voulez comprendre
d’où vient le gros rock qui tâche, il faut que vous écoutiez ce disque.
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