Quand je pense à Supergrass, comme tout le monde, c’est le
tube (quel vilain mot) “Alright” qui me vient à l’esprit. La simple écoute de
ce titre me replonge immédiatement dans l’été 1995, je ne me souviens que des
jours ensoleillés, de mes potes et de nos virées à vélo, j’avais douze ans.
Qu’elles étaient bonnes ces putains de grandes vacances scolaires, 2 longs mois
pour s’amuser, 2 mois de liberté, « School’s Out For Summer…» mes
amis. Du coup « Alright » est synonyme de soleil pour moi, je dirais
même que cette chanson possède le goût de l’innocence, celui d’un paradis
perdu. Sans doute un fantasme enjolivé par le souvenir. Toujours est-t’il que
j’adore Supergrass en partie grâce à cela. En partie, car il faut dire que le
groupe a publié 6 albums d’une qualité exceptionnelle.
« Road To Rouen » est le cinquième et
avant-dernier album de Supergrass, le titre du disque fait référence au
mythique « Road To Ruin » des Ramones. Mais il est ici inutile de
chercher l’énergie punk des faux-frères New-Yorkais, ce serait peine perdue.
Car si au début de leur carrière Gaz Coombes et ses potes possédaient une
grande énergie oscillant entre brit’pop et punk, celle-ci fut définitivement
mise de côté lors de la création de
« Road To Rouen ». L’album est en grande partie acoustique,
d’une fluidité extraordinaire. « Tales Of The Endurance », le long
morceau d’ouverture, se divise en trois mouvements (4,5 et 6), il faudra nous
dire un jour où sont passés les trois premiers. La partie chantée est presque
aérienne, puis le groupe muscle un peu le propos à l’aide d’une rythmique funky. Avec
« St. Petersburg » les gars s’offrent un morceau country-folk
mélancolique, le tout superbement arrangé, un délice. « Sad Girl »
est une chanson pop dans la grande tradition anglaise; malgré sa modernité
indéniable, il est très difficile de ne pas penser aux Kinks. Je ne sais pas si
« Roxy » est un hommage au groupe de Brian Ferry, mais c’est le titre
le plus « Shiny » de l’album, le plus prog également. Après un court
aparté instrumental, le groupe durcit un peu le ton avec la chanson-titre et aussi
« Kick In The Teeth », encore un morceau purement british ; qui
a parlé des Beatles ? « Low C » est une splendide ballade, elle
semble traiter de vieux souvenirs de jeunesse, mais ne nous apprend pas grand
chose. L’album se referme avec « Fin », un morceau étrangement
vaporeux, qui clôt de bien belle manière cette parenthèse mélancolique dans la
carrière du groupe.
Supergrass reviendra en force avec « Diamond Hoo
Ha », avant de splitter fin 2010…