mardi 20 août 2013

ALICE COOPER - Le temps des métamorphoses - 2000-2011

Rappel de l'épisode précédent. Nous avions laissé Alice Cooper en 1994 au moment de la parution de The Last Temptation, un album génial. Avec cet opus, le prince du shock-rock abandonnait enfin son hard de pacotille trop typé 80's pour voguer vers des océans plus noirs. Un véritable électrochoc bourré de bonnes compositions, un retour salvateur au concept album avec un nouveau tueur et même un comic book. Bref, cela laissait entrevoir une gigantesque tournée ainsi qu'une relance artistique de la carrière du monsieur. Mais il n'en sera rien. Pas de gros show à l'horizon et la relance attendra, puisqu'il faudra patienter six longues années pour enfin voir débarquer le successeur de The Last Temptation, six rotations autour du soleil et une métamorphose. Brutal Planet sera sombre, industriel et dépourvu d'horreur grand-guignol. 

BRUTAL PLANET - 2000 et DRAGONTOWN - 2001 - Le diptyque noir 


La chose remarquable depuis le début du nouveau millénaire, c'est que les disques du Coop' semblent fonctionner par paires. Une nouvelle mutation tous les deux albums, j'ajoute que cela est vérifiable jusqu'au tout dernier: Welcome 2 My Nightmare. A chaque fois, le modèle est le même, le second opus de chaque diptyque est plus ouvert, plus varié, il nous prépare à la métamorphose à venir. Pour l'heure, Brutal Planet et Dragontown lorgnent vers le metal industriel, Alice semble à son tour s'inspirer de Marylin Manson (un juste retour des choses). Car en six ans, les goûts du public ont changé, et l'indu est très à la mode en ce début de décennie. On aurait pu craindre le pire, car le Coop' semble vouloir surfer sur la vague, comme jadis avec le Hard FM de Constrictor et compagnie. Mais il n'en est rien, car la qualité est bel et bien au rendez-vous. Sans être un chef-d'oeuvre, Brutal Planet demeure un album de haute tenue. Bien sûr, le son monolithique et massif typique de l'époque a déjà beaucoup vieilli, mais les nouvelles chansons sont diablement bien écrites. Les textes sont d'une noirceur abyssale et jamais Alice n'aura été aussi sarcastique. Il nous offre une vision finalement assez juste de ce que seront les glorieuses années zéro. En dehors du fait de dépeindre un monde quasi post-apocalyptique, Brutal Planet délivre aussi quelques portraits pour le moins glauques. De la femme battue de "Take It Like A Woman" au freak néo-nazi de "Wicked Young Man", tout ici est puissant. De plus, l'emploi régulier du JE ajoute beaucoup au côté dérangeant de l'affaire.

Dragontown est le jumeau de son prédécesseur, creusant le même sillon, mais jouissant d'une plus grande variété et d'une production plus claire. Même si au final, celui-ci s'avère être un cran en-dessous. La faute à quelques compositions un peu trop banales et manquant grandement de rythme et d'inspiration. Mais dans sa majeure partie, Dragontown se tient plutôt bien. La filiation entre les deux albums s'explique également par le fait qu'ils se situent dans le même monde. D'après son créateur, Dragontown est la ville la plus violente de Brutal Planet, un concept fort, encore une fois. Alice est un grand portraitiste macabre, "Fantasy Man" et "Sister Sara" en témoignent. Le premier est une réminiscence white trash de "Wicked Young Man" tandis que le second se pose en remake glauque de "Nurse Rozetta", une figure marquante de l'album From The Inside datant de 1978. Mais déjà le croque-mitaine s'apprête à changer de forme.

THE EYES OF ALICE COOPER - 2003 et DIRTY DIAMONDS - 2005 - Retour aux sources


Virage à 180° avec The Eyes Of Alice Cooper, fini le metal industriel et retour aux fondamentaux du rock basique et pas prise de tête. La noirceur qui hantait les précédentes livraisons disparaît elle aussi au profit de purs moments de rigolade et d'horreur décomplexé et fun. C'est un fait, Alice regarde dans le rétroviseur, mais c'est un coup d’œil salvateur. On retiendra surtout "What Do You Want From Me", "Novocaine" ou encore "Detroit City", un vibrant hommage à cette ville si particulière qui aura vu naître le MC5 et les Stooges (entre autres). The Eyes Of Alice Cooper, tout comme Dirty Diamonds, est un album immédiat, enregistré quasiment live in studio dans l'urgence et l'énergie du moment.

Dirty Diamonds justement, est un des meilleurs disques du Coop'. Plus ouvert et mieux fichu que le précédent, celui-ci renferme des compositions d'une qualité redoutable. Du rock simple et efficace avec "Woman Of Mass Destruction" ou "Perfect", de la ballade vaudou grâce à l’inénarrable "Zombie Dance" et aussi un hommage à peine dissimulé aux Black Sabbath période Paranoid, via le vibrant morceau-titre. De plus, l'album contient "The Saga Of Jesse Jane", une ballade country & western travelo absolument incroyable. Alice Cooper y chante comme jamais, à la manière du Iggy Pop crooner de ces dernières années, mais en bien. Dirty Diamonds est l'aboutissement du trip rétro d'Alice et encore une fois, il annonce une nouvelle mutation.

ALONG CAME A SPIDER - 2008 et WELCOME 2 MY NIGHTMARE - 2011 - Concept(s)


La grande passion du Coop' a toujours été les albums concept, souvent horrifiques, bardés d'épouvante pulp dans la plus grande tradition américaine. Along Came A Spider signe le grand retour de la chose dans la discographie du maître. Encore une histoire complètement barrée, celle d'un serial killer qui découpe des corps de femmes pour créer une araignée géante, rien que ça! Mais qui est ce tueur, Steven? Certains détails laissent imaginer que le petit garçon de Welcome To My Nightmare a mal tourné. Musicalement, le projet sonne très hard rock typé 80's, mais étrangement, c'est une franche réussite. Les onze titres sont plutôt efficaces, ça déboulonne comme une bonne série B, l'équivalent sonique d'un Slasher à l'ancienne. Un bon cru.

Le voici enfin, le projet tant attendu, dans les cartons depuis plus de vingt ans. La suite du blockbuster d'Alice, son premier album en solo, son plus légendaire, le bien nommé Welcome To My Nightmare. Cette séquelle est le disque de tous les excès, multitude d’invités et de styles, production Bigger Than Life et gros marketing. Autant le dire tout de suite, Welcome 2 My Nightmare déçoit autant qu'il enchante. Déception car l'attente fut trop forte, générant ainsi des exigences impossibles, et enchantement car c'est tout de même un putain de bon disque. Steven fait toujours des cauchemars (ce qui ne remet nullement en cause l'hypothèse selon laquelle il serait le tueur de Along Came A Spider), et ce pour notre plus grand plaisir. Et puis réentendre le Alice Cooper Group réuni le temps d'un "Runaway Train" absolument dévastateur, ça fait un bien fou. Welcome 2 My Nightmare n'est certes pas du niveau de son illustre aîné, mais qu'importe il envoie du lourd et c'est tout ce qui compte.  

Un nouvel album est prévu pour l'année prochaine, constitué uniquement de reprises, une autre mutation en somme. Bob Ezrin, son producteur fétiche, serait à nouveau aux manettes. Quoi qu'il en soit, gageons que le vieux croque-mitaine nous régalera encore grandement à l'avenir.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.