jeudi 30 août 2012

N°68 THE FLAMIN' GROOVIES - Teenage Head - 1971


"Teenage Head" est l'album Stonien des Flamin' Groovies, on peut même aller plus loin en disant que c'est leur "Sticky Fingers". Mais en plus foutraque, garage et adolescent, donc forcément plus rock and roll, et j'ose le dire, meilleur. Je sais que je m'expose aux mails d'insultes et autres commentaires assassins en disant cela, mais je maintiens. Les deux premiers albums du groupe ("Supersnazz" et "Flamingo") furent des bides, malgré leurs indéniables qualités. Mais "Teenage Head" est une toute autre affaire, sur cet album les Groovies mettent le turbo, ils durcissent le ton. Si l'influence majeure est sans aucun doute les Stones, comment ne pas faire le lien avec les Stooges et le MC5?

"High Flyin' Baby" débute avec un démentiel riff de guitare slide, d'une simplicité et d'une limpidité extrêmes. C'est un morceau assez cinglé, et les vocaux à la Captain Beefheart n'y sont pas étrangers. Avec "City Lights", le groupe nous offre l'une des plus belles ballades des Stones non écrite par les Stones. Un titre qui sent bon la poussière, une véritable invitation à prendre la route au volant d'une vieille muscle-car rouillée. Gros coup d'accélérateur, "Have You Seen My Baby?" verse dans un rock primitif, tous les potards sont à onze, quel pied! On sent que les Flamin' Groovies veulent prendre leur revanche, ils sont là pour distribuer des pains dans la gueule. Plus loin, le rageur "Teenage Head" ajoute encore un peu d'huile sur le feu. Ce morceau est une furie rock, quel riff mes amis! La bride est lâchée et le groupe est définitivement hors-contrôle. Après ça, même la convenue reprise de Robert Johnson sent le souffre. Et quand les Groovies virent rockhab' c'est pour mieux parodier Elvis; ces types ne respectent décidément rien, et c'est tant mieux. Comme pour éteindre le feu qu'il a lui même allumé, le groupe referme le disque avec une bonne vieille ballade sudiste. "Whiskey Woman" est une apaisante conclusion, nous permettant de sortir de l'album l’esprit tranquille.

Sur l'édition cd de 1999, vous trouverez moults bonus sublimes, presque uniquement composés de reprises qui sentent bon les longs jams de studio. Et pour ne rien gâcher, le son est sublime!

dimanche 26 août 2012

N°67 GRANDADDY - Sumday - 2003


Il y a quelques temps, je vous ai dit tout le bien que je pensais de Grandaddy, via ma chronique de "The Software Slump". Ce dernier est considéré comme la grande oeuvre du groupe, mais il est tout à fait possible de lui préférer "Sumday". Paru en 2003, celui-ci est plus accessible, moins alambiqué, c'est l'album "Grunge" du groupe. Les guitares sont crados juste ce qu'il faut, les bidouilles électroniques sont toujours aussi inventives, mais surtout les compositions sont d'une limpidité désarmante; tout ici est évident.

"Clic, clic" l'ordinateur débloque et nous télétransporte dans l'univers geek de Grandaddy. "Now It's On" est une parfaite entrée en matière, pop-onirique mais jamais indigeste; Jason Lytle est décidément un homme extrêmement doué. Il ne tombe jamais dans des pièges prog-rock et évite brillamment le pathos, il flirte juste avec. Le mélancolique "I'm On Standby" rappelle ces jours de fin d'été, quand le temps semble ralentir à mesure que les jours raccourcissent. Ces instants étranges entre nostalgie et apaisement, des moments doux et précieux. Les synthés sont toujours aussi bien utilisés, de quoi vous réconcilier avec cette diabolique invention, les nappes de "Lost On Yer Marry Way" donnent du volume au morceau. Parfois, le tempo grimpe un peu, histoire de nous sortir de notre douce torpeur. Ainsi, les guitares cradingues de "El Caminos In The West" libèrent un peu d'adrénaline, tout juste canalisés par un refrain très mélodieux. "Saddest Vacant Lot In All The World" évoque la misère quotidienne, une sorte de chronique alcoolique et white-trash. "The Final Push To The Sum" annonce la fin du périple, bientôt l'ordinateur nous renverra sur terre. C'est avec une grande tristesse que nous saluons nos hôtes, un piano mélancolique et quelques envolées, des adieux finalement très heureux.

Trop méconnu, Grandaddy est un nectar pour les oreilles, et cet album est idéal pour découvrir ce groupe de Modesto, Californie. Alors n'hésitez plus, si ce n'est pas déjà fait!

vendredi 24 août 2012

BRUCE SPRINGSTEEN - Wrecking Ball


Le nouveau Springsteen est bon, bien meilleur en tout cas que "Magic" ou "Working On A Dream". Oui, mais voilà, le nouveau Springsteen est si frontalement engagé qu'il flirte dangereusement avec la démagogie. Le Boss dans la peau d'un "protest singer", ce n'est pas nouveau. Mais là où "The Ghost Of Tom Joad" brillait par une qualité d'écriture extraordinaire, "Wrecking Ball" manque de verve et d'inspiration. Les textes sont bourrés de lieux communs du genre: "Les banquiers s'engraissent et les ouvriers maigrissent", sans déconner! Que Bruce écrive de manière bancale sous le coup de la colère est compréhensible, ce qui l'est moins, c'est son refus de s'engager politiquement comme il l'avait fait pour Obama lors des précédentes élections. Contradictoire cette affaire...

Mais passons au contenu, car après tout c'est pour ça qu'on est ici. L'album débute avec "We Take Care Of Our Own", un premier single bien trop classique qui tente de renouer avec le son des débuts sans jamais y parvenir; dommage. "Easy Money" et "Shackled And Drawn" donnent dans un folk débridé, tendance Irish pour l'une et New-Orléans pour l'autre, un vrai régal. La production est plus aérée que sur les précédentes livraisons du boss. Le  producteur peu doué Brendan O'Brian est enfin parti, quel soulagement! Exit aussi le E-Street Band, la liste des musiciens participants à "Wrecking Ball" est longue comme un jour sans pain. Il est toutefois très émouvant d'entendre une dernière fois le Sax du regretté Clarence Clemons, notamment sur le génial morceau-titre. Si certains moments sont assez pénibles (la chiante "This Depression") voire douloureux (le rap mainstream de "Rocky Ground"), le disque est globalement de haute tenue. En fin de galette, le bosse se fend même d'une grande chanson. "We Are Alive" est un petit chef-d'oeuvre, même si la mélodie frôle le plagiat de "Ring Of Fire", avec les trompettes mariachi et tout le tintouin! L'édition deluxe (un album sur fond de lutte des classes, qui propose une version pour pauvres et une pour riches?! hum) comporte deux titres en plus, dont une hallucinante interprétation de "American Land", le récent séjour de Bruce chez les Dropkick Murphys a visiblement laissé quelques traces.

Au final, Bruce Springsteen nous livre un album plutôt bon, même si pas très fin.

jeudi 23 août 2012

NEIL YOUNG & THE CRAZY HORSE - Americana


Qu'il est bon de retrouver le son foutraque du Crazy Horse! Voilà la première remarque que l'on se fait après avoir appuyé sur la touche "Play". "Americana" semble avoir été enregistré dans l'urgence au fin fond d'une cabane perdue, et en une seule prise! C'est roots, gras et franchement jouissif!

Neil Young nous sert le traditionnel album de reprises, comme bien d'autres avant lui. "Americana" est en grande partie composé de chants traditionnels électrifiés. Souvent, c'est toute la ligne mélodique qui est modifiée. Ainsi, le classique folk "Clementine" devient un long rock à la fois lourd et planant. "Travel On" renvoie directement au sublime "Raggad Glory", l'un des meilleurs albums du Loner, sans toutefois en atteindre les sommets. Et c'est bien le problème de cet "Americana", cela a beau être superbe, il manque la petite étincelle qui transforme un bon disque en chef-d'oeuvre. Même si les versions de "This Land Is Your Land" et "Wayfarin' Stranger" (je vous conseille vivement la version enregistrée par Johnny Cash) sont sublimes, ça ne sera pas suffisant pour inverser la vapeur. Et puis que vient foutre "God Save The Queen" (pas celui des Sex Pistols...) sur un disque nommé "Americana"? Certes la version est fortement américanisée, mais tout de même...

J'en attendais sans doute trop, tout excité que j'étais par les retrouvailles avec le cheval fou. Il s'en est pourtant fallu de peu pour que le poney se transforme en mustang sauvage et fougueux!

mercredi 15 août 2012

THE FOUR OWLS - Nature's Greatest History



The Four Owls, c'est la fine fleur du label anglais High Focus Record, réuni sous la forme d'un "supergroupe". Le "supergroupe" est quelque chose de presque commun dans le milieu du rock, pour le meilleur comme pour le pire, mais moins dans la sphère du rap underground. Fliptrix, Leaf Dog, Verb T et Bva Mc possèdent chacun leur "Chouette-avatar", ce qui rend le groupe irréel et intrigant; un peu à la manière de Gorillaz.

"Nature's Greatest History" est un disque de Hip-Hop bien Old School qui cogne fort. Un truc qui renvoie aux grandes heures des Beastie Boys ou de Public Enemy. On est très loin du Rap mainstream insipide que nous déversent les ondes radios. Ici, ça sample sévère, un peu à la manière des illustres productions des Dust Brothers, "Paul's Boutique" en tête. Le groupe nous offre des purs moments de bravoure, en témoigne le bulldozer "Much Too Much"; un rap d'une lourdeur incroyable. Chaque beat donne l'impression de crouler sous les poings de Mohammed Ali, on en ressort étourdi; putain quel morceau! Le rap arrogant des quatre chouettes est un vrai régal, "Betrayal" enterre tout, les anciennes têtes couronnés du rap tombent une à une! Aucun rappeur-star n'est guère plus capable d’accoucher d'un tel titre, et cela même dans la douleur. "Life In The Balance" sample Nina Simone (une preuve de bon goût), j'en vois déjà qui crient au scandale, mais le morceau est sublime...

"Nature Greatest History" est dispo un peu partout en téléchargement légal, mais également en CD et Vinyle sur le site de High Focus Records.

Lien Spotify

vendredi 10 août 2012

THE SHINS - Port Of Morrow


Après plusieurs années d'absence et une parenthèse enchantée avec Danger Mouse, James Mercer revient à son premier amour, les Shins. Seul maître à bord de son groupe métamorphe, James nous offre dix chansons pop de haute tenue. L’expérience Broken Bells a laissé quelques traces dans l'écriture des morceaux qui composent ce "Port Of Morrow". En effet, la spontanéité qui faisait le sel des premiers albums est quelque peu absente ici, au profit d'un art plus mûr et maîtrisé. Comme toujours, ce que l'on gagne d'un côté, on le perd de l'autre...

Le voyage débute avec "The Rifle's Spiral", une chanson somme toute assez classique, un brin complexe sous son apparente simplicité. Arrive ensuite "Simple Song", le premier single issu de l'album; rien à dire dessus, c'est un chef-d'oeuvre! Sans aucun doute la chanson pop de l'année et ce n'est pas négociable! L'album n'est pas avare en morceaux de bravoure, en témoigne le tiercé gagnant que forment "It's Only Life", "For A Fool" et "Port Of Morrow". Cette dernière chanson referme magistralement le disque sur une note mélancolique et vaporeuse. Mais la lumière n'est jamais bien loin, et c'est le sourire aux lèvres que l'on ôte l'album de la platine.

"Port Of Morrow" est un bonheur de tous les instants, il figure déjà parmi mes albums favoris de 2012. Et pour l'avoir écouté un bon nombre de fois, je peux vous dire que ce n'est pas un de ces soufflets qui retombent lamentablement dès la seconde écoute, comme c'est bien trop souvent le cas en ce moment!

mercredi 1 août 2012

THE BLACK ANGELS – Phosgene Nightmare



J'ai décidé de faire les choses dans le désordre, après le 45 tours de 2012, voici le E.P de 2011. Tous deux parus en édition limitée et en glorieux vinyle pour le "record store day".

Alors, que valent vraiment les 6 titres couchés sur ce vinyle 25 cm blanc immaculé ? Et bien, si « Phosgene Nightmare » est une collection de B-sides, cela ne veut pas dire pour autant que les morceaux  ici présents soient de qualité moindre, loin de la. Dès l’ouverture: « Melanie’s Melody », on a droit au grand jeu de la ballade psychédélique, son vaporeux et voix bourrée d’échos. Puis déboule « Ronettes », dont le titre est un hommage appuyé au Girls band de Phil Spector, la musique quant à elle tient plus du « The End » des Doors que de « Be My Baby ». C’est avec le troisième titre, « The Boat Song », que le disque entame un virage très pop, ce qui confirme le changement de cap déjà amorcé par le groupe avec l'album « Phosphene Dream ». « At Night » fait penser aux premières compositions des anges noirs, c’est un morceau psyché très sombre mais assez banal. Qu'importe, car « Choose To Choose » est une merveille pop typée 60's, voilà une chanson qui, interprétée par Nico, n’aurait pas fait tache sur le premier album du Velvet Underground. Le disque se referme avec une version chamanique de « Entrance Song », bien plus psychédélique que celle disponible sur « Phosphene Dream ». Si cette variation dite « Rain Dance » perd en puissance sonore, elle se paye tout de même le luxe de nous mettre en transe, de quoi nous donner envie d’aller fumer le calumet dans le désert.

Les Black Angels sont brillants, même leurs fonds de tiroirs sont au dessus du lot. Vivement le quatrième album…(longue est l'attente!)

Lien Spotify